1 novembre 2020

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Edwin Holgate - October

Je marche au-dessus du bruyant d’ordres. Une fatigue s’est installée. Je me fie à l’instinct de mes pas sur les pierres. À chaque pierre bougée, un de mes silences se libère. À chaque pierre bougée, ma colère. Je l’entends aboyer, celui-là et puis un autre, dans la vallée. Le chien aboie avant qu’il ne m’ait vu, la femme le calme, je m’excuse de les avoir effrayés. Ce n’est pas vous, c’est notre chien qui nous a effrayés. On parle : du beau temps, de l’endroit où ils se sont assis. L’homme porte un chapeau, je le vois de dos. Sa voix me dit des choses de lui. Une buse apparaît. L’homme déclare, jumelle aux poings : le corbeau lui vole après. En effet. Je leur dis que c’est beau tout ça, sans entrer dans les détails. Je leur dis je viens chercher ici le soleil qui manque dans la vieille ville où je vis. On passe du soleil à la lune. La femme est heureuse, car on annonce la lune bleue et que, pour une fois, le ciel est dégagé. Elle la prendra sur son balcon au moment où la lune s’élève au-dessus du Glandasse avec son appareil photo. On poursuit le chemin ensemble, on traverse le paradis du thym. Le chien se frotte à mon mollet, deux fois, comme pour m’avertir de quelque chose. Je ne comprends pas son langage de chien. Il plante ses dents dans ma cheville, presque délicatement. Je garde deux petits trous aussi rouges que les yeux d’un serpent. La femme se désole en grondant son chien et moi je lui réponds "pas si grave". Je vais quand même partir devant.
Est-ce que je vais aimer l’hiver ? Les jours qui tombent ? Que l’on épuise jusqu’à ce qu’ils tombent ? Comment vont-ils le supporter ce temps long, mon père, mes enfants, mes amis ? Le temps long se dissout à la vue d’une sauterelle qui vient de sauter sur ma chaussure. Soudain. Mon attention se concentre sur un monde pas plus large qu’une feuille d’orme.